VATICAN

État de la Cité du Vatican
Superficie : 44 ha
Population : 800 hab. environ

Le Saint-Siège, autrement dit, l'État pontifical ou Vatican, occupe une place très particulière en Europe et dans le monde. Ne reposant sur aucune population particulière, insignifiant sur le plan territorial, il est en effet le seul État qui puisse se définir comme transnational et qui possède, de par l'importance du catholicisme sur tous les continents, un réel ascendant moral sur plusieurs centaines de millions de personnes.

Bilan Politique

  1. Démographie et société
    On en voudra pour preuve le rôle immense tenu par le Saint-Siège en ce qui concerne le contrôle de l'accroissement démographique dans toute une grande partie de l'Afrique, des Amériques et de l'Asie-Océanie, zones d'expansion récente du catholicisme. En Europe, cependant, sur le plan de la famille et de la sexualité ou à bien d'autres niveaux, son influence s'est considérablement réduite depuis la révolution industrielle qui a bouleversé l'ordre social, et depuis l'achèvement de l'unité italienne qui l'a dépossédé de tout pouvoir temporel.

  2. Rôle diplomatique
    Jouant, de par les effets de l'implantation universelle du catholicisme, un rôle capital dans la résolution de nombreux conflits, passés ou en cours, le Vatican, également puissance économique, n'a pas toujours eu une attitude conforme aux préceptes des Évangiles.

    1. Relations avec les peuples colonisés
      Bien souvent, c'est de l'attitude des prélats locaux qu'a dépendu son soutien aux émancipations de diverses populations catholiques colonisées en Afrique, aux Amériques et en Asie, la papauté faisant souvent preuve d'un étroit conservatisme.

    2. En Europe, l'Église de Pierre a constamment manifesté une préoccupation sourcilleuse quant à la primauté de son autorité spirituelle. Mais ces appétits temporels auront été depuis plus d'un millénaire une source non négligeable de conflits sanglants.

    3. En Italie
      On retiendra également, les conséquences particulièrement néfastes qu'aura eues l'existence d'une entité papale sur le développement historique de la nation italienne. Celle-ci a vu sa naturelle unité contrariée pendant des siècles même si, d'un autre côté, le poids culturel du catholicisme a pu avoir un aspect unifiant.
      Quant au rôle plus récent du Vatican dans les affaires italiennes, on a pu voir à quels résultats particulièrement désolants, il a pu conduire.

    4. A l'Est
      L'action du Vatican en faveur des populations catholiques d'Europe de l'Est a été positive pour leur émancipation nationale et sociale récente (Pologne, Lituanie, Ukraine, Tchécoslovaquie, Hongrie). Plus controversée aura été l'attitude du Saint-Siège à l'égard de l'indépendance de la Slovénie et, surtout, de la Croatie. Mais, pas plus qu'à d'autres, on ne saurait lui reprocher d'avoir appuyé un mouvement de fond, populaire et démocratique. Cependant, l'État pontifical, au delà de ses engagements humanitaires, n'a pas semblé jouer au maximum de son influence auprès des Croates afin de les amener à définir une voie réaliste vers l'éradication des contentieux yougoslaves.

    5. En Irlande
      La papauté a largement paru absente, n'ayant pris, semble-t-il, aucune initiative digne de ce nom, et susceptible d'amener les Irlandais catholiques et les unionistes protestants à s'entendre sur une solution territoriale de compromis. Ne faut-il pas voir là, la marque d'une volonté constante de l'Église catholique? Ayant largement profité de l'expansion coloniale du Royaume-Uni pour accroître son influence de par le monde, accepterait-elle en contrepartie, le statu quo colonial dans les îles Britanniques ?

    6. Relations avec le judaïsme et Israël
      On pourrait rappeler également la défiance multi-séculaire à l'égard du judaïsme dont l'aboutissement aura été l'attitude plus qu'ambiguë de la hiérarchie catholique au moment de la mise en oeuvre de la solution finale par les nazis. La non-reconnaissance de l'État d'Israël pendant 45 ans s'inscrit également dans ce filon.

Analyse de la stratégie actuelle du Vatican.

Après des décennies marquées par la défense d'un pouvoir spirituel et matériel en déclin et par l'adaptation de l'Église au monde moderne, la géopolitique vaticane est repartie à l'offensive avec le pontificat de Jean-Paul II, premier pape polonais de l'Histoire. Relançant l'évangélisation à l'Est, s'adaptant médiatiquement à l'Ouest, renouant avec le judaïsme et s'insérant dans la nouvelle dynamique proche-orientale, le Saint-Siège a visiblement défini une stratégie de présence tous azimuts et cherche à se réinsérer dans le cours de l'Histoire en position d'avant-garde morale et sociale. Tablant sur l'aura mythique de progrès qui enveloppe tout ce qui arrive d'Occident mais aussi, comptant sur l'évident besoin des populations d'être rassurées spirituellement dans un contexte particulièrement trouble, le Vatican s'est trouvé une nouvelle frontière .

Une politique dangereuse

C'est sans doute une gageure osée : les tendances nationales, pour ne pas dire nationalistes, au sein des autres religions risquent de s'exacerber, alors que s'effacera l'adhésion profonde de populations de plus en plus attirées par les comportements moraux, sociaux, familiaux et sexuels de type occidental. L'apparition du catholicisme ou son renforcement au delà de ses traditionnelles régions d'ancrage sera fatalement ressenti comme une agression contre les identités culturelles nationales. Il est assez étonnant que l'inspirateur de cette politique offensive, ait sous-estimé la permanence de l'aspect identitaire dans la religion, alors même que, dans sa lutte contre le communisme, il s'était appuyé efficacement sur la corrélation nation/tradition religieuse .

Conclusion

Dépouillées de leur inébranlable foi dans leur vocation universaliste, l'Église catholique et son expression Étatique pourraient être d'authentiques facteurs de paix et de coopération.
Mais leur millénaire structure hiérarchique et ultra-centralisée ne les prédisposent pas à une telle mission. Seule la force des réalités humaines pourra les amener à plus de modestie et donc, à revoir leur approche des rapports entre communautés religieuses et entre nations.

Jean-Louis Veyrac, 1994

Voir aussi : Italie, Pologne

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