La seule parade consisterait à imaginer un fédéralisme roumain respectueux des disparités régionales et des réalités ethno-culturelles et à le mettre en place sans tarder. Ce serait la seule politique crédible pouvant mener à une confédération pan-roumaine.
2) Moins grave mais cependant pas sans conséquences, demeure le sort des Serbes de langue valaque de la région des Portes de Fer dans la République fédérale de Yougoslavie. Lorsque l'État serbo-monténégrin aura trouvé son assise et adopté un minimum d'institutions démocratiques, ces Valaques pourraient alors assumer leur identité ethnique roumaine.
De l'autonomie nationale au rattachement à la mère-patrie, le cheminement paraît assez évident. Mais cette minorité devra d'abord renoncer à son ultra-patriotisme serbe, témoin négatif d'une identité profonde refoulée.
Il est à noter que les Roumains de Voïvodine doivent être considérés à part, leur situation s'apparentant à celle des autres nationalités non-territoriales de la Yougoslavie.
3) Pour ce qui est des Aromounes, autrement dit Zinzares, Koutsovalaques, Vlaques ou Anovlaques, la création d'un foyer national autonome dans le massif du Pinde en Grèce semble s'imposer comme la solution la plus appropriée.
4) La question la plus épineuse pour l'État roumain reste bien sûr celle de ses minorités territoriales magyares.
Une redélimitation des frontières avec la Hon-grie permettrait de résoudre le problème des zones magyares ou roumaines des confins. Par contre, en ce qui concerne les Szeklers (ou Sicules), le rétablissement de leur territoire qui fut autonome entre 1955 et 1968 est une nécessité incontournable. Si d'évidentes raisons psycho-politiques interdisent pour longtemps le rattachement de la Siculie à la Hongrie, l'obtention par les Szeklers d'un libéral statut de minoritaires permettrait des liens de bon voisinage durables entre Roumanie et Hongrie.
5) En ce qui concerne les petits districts ukrainiens du nord du pays, leur sort est naturellement lié au règlement de tous les litiges pendants entre l'Ukraine, d'une part, la Moldavie et la Roumanie, de l'autre.
Un remodelage de la frontière est donc concevable dans le cadre d'une négociation tripartite. L'échange de la zone ukrainienne contre l'essentiel de la Bucovine du Nord pourrait être réalisé parallèlement au troc de la Transnistrie moldave contre e Bujak ukrainien.
6) La question tsigane revêt en Roumanie une importance considérable du fait du nombre élevé de membres de cette ethnie. Pourquoi ne pas leur accorder un statut de nationalité territoriale ? Le nord de la Transylvanie conviendrait parfaitement à la constitution d'un foyer national autonome des Tsiganes. C'est un territoire que Roumains et Magyars se disputent sans que l'une ou l'autre des revendications opposées apparaisse comme particulièrement fondée ; la question se trouverait ainsi résolue. De plus, cette région correspond à peu près au centre géographique de la diaspora tsigane en Europe de l'Est.
Evidemment, l'aspect le plus crucial réside dans la grande inconnue que représente l'émergence ou non d'un sentiment national même relatif chez ce peuple et qui seul, justifierait un regroupement sur un territoire donné. Néammoins, le sort peu enviable qui est réservé de toutes parts aux Tsiganes mérite qu'on s'efforce sérieusement de résoudre la question, dans les mêmes termes qui s'imposent partout ailleurs.
Jean-Louis Veyrac 1994
Voir aussi :
Bulgarie, Grèce,
Hongrie, Moldavie, Ukraine,
Yougoslavie